Voici un mot qui pourrait être particulièrement puissant dans le cours de notre vie, et qui, s’il reste bien connu des lecteurs, est en revanche assez peu utilisé dans notre vocabulaire oral. Et pour cause, ce terme semble plus exprimer une volonté de mettre un point final à une histoire démarrée plus tôt, écrite donc, qui aurait été racontée par un auteur désireux de terminer l´élaboration de son ouvrage.
Derrière ce mot, peut également se cacher une forme de tabou dans notre société, car dans un sens plus profond, le jour où l´on rendra notre dernier souffle, cet instant marquera ainsi l´épilogue d´une vie, notre vie. Pour laquelle, normalement, nous aurons été son principal (pour ne pas dire unique) auteur et protagoniste.
Si notre responsabilité sur cette terre est bien de réaliser ce qui nous semble le mieux, alors autant agir en son âme et conscience à chaque moment où un choix important doit être fait. A ce titre, me vient en tête la citation suivante: « Mieux vaut avoir des remords que des regrets ». Si à priori cela semble clair comme de l´eau de roche et que comme beaucoup je n´avais pas de raison de remettre cette formulation en question, il y eut en ce qui me concerne un avant et après dans sa signification. En effet, suite à une conversation chez mon hôte professionnel du moment (c´était pour la petite histoire un ch´ti, synonyme de personne au grand cœur), ce dernier me répondit, avec conviciton, qu´en fait les mots étaient justes mais que le sens de la phrase avait dû être inversé. « C´est à dire ? Comment ça ? Demandai-je interloqué ». Il me répondit, mettant fin au suspense, que de son point de vue, au contraire, il était préférable « d´avoir des regrets plutôt que des remords ».
J´avoue avoir mis très longtemps à choisir mon camp, et paradoxalement c´est en écoutant une autre expression dans une langue voisine que tout est devenu plus limpide. Dans la langue de Cervantes , il est exprimé le fait « qu´il vaut mieux regretter les choses que l´on a faites plutôt que celles que l´on n´a pas faites ». Entre deux options, donc, la possibilité de retenir l´action. Ce qui me va tout à fait.
Pour reprendre la signification du terme « Epilogue » cela revient à l´idée qu´à un moment donné une action – un roman pour reprendre l´exemple initial dans ce cas précis – doit respectivement s´arrêter, s´achèver. Il faut une conclusion. C´est d´ailleurs à l´auteur(e) de considérer lui/elle-même quand il/elle souhaite clôturer ce temps de création, et conséquemment estimer qu´il doit maintenant consacrer son énergie à autre chose que la principale écriture de son œuvre (Nota : Au sens générique du terme bien évidemment, car cela va de soi que ce sont surtout les lecteurs potentiels qui détermineront la qualité de son rendu ainsi que de fait son succès).
Après cette première décision de mettre fin à cette forme d´inspiration créatrice, l´étape d´après (pour l´auteur) est bien celle de permettre à son ouvrage d´être lu et relu par d´autres personnes afin d´enlever, d´atténuer, les petites imperfections, les fameuses « coquilles » qui viendraient parasiter la lecture (voir la compréhension) ultérieure du message exprimé (destiné au lecteur final).
Le choix des relecteurs est directement fonction de l´ambition affichée et/ou du niveau d´exigence attendue. Certains trouvent plus sages de déléguer cette partie à des professionnels de la correction, spécialistes des règles grammaticales, de la concordance des temps. Ou encore du choix du vocabulaire approprié et plus particulièrement la validation des constructions de phrases. Tandis que d´autres, qui seraient susceptibles de s´estimer davantage « puristes » dans la manière d´écrire, souhaitent au contraire conserver au maximum leur style, sans le dénaturer. Ces derniers s´en remettent plus facilement à un entourage qu´ils jugent compétent (ou à minima considéré comme tel) pour respecter ainsi les prérogatives.
Accepter de se faire « corriger », notamment dans le choix ou la renonciation d´utiliser certains mots est une étape déterminante qui « challenge » celui ou celle qui se doit ainsi d´accepter de laisser « échapper » une partie de son écrit ; Voir « s´éloigner » son « bébé » pour mieux lui permette de « grandir ». Si corriger revient souvent à modifier, du moins pour une partie de ce premier jet, le but reste bien malgré tout de contribuer à l´amélioration du texte.
Comme dans bien d´autres tâches, il peut souvent devenir nécessaire de « retravailler » cet écrit avant en définitive de passer à la partie dite « d´impression » qui permet de relier et donc de distribuer ce support.
In fine, diffuser, et ainsi en faire profiter une majorité de lecteurs (débutants ou plus aguerris). Etant entendu que la renommée de l´auteur, son style, ou même le prestige de la maison d´édition permettront dans un intérêt commun d´impacter positivement les premières ventes.
Car l´épilogue d´un livre qu´on se le dise est bien sa publication.
Pour conserver ce parallèle, l´épilogue d´une vie peut ressembler à sa bonne réalisation.
Dans un cas comme dans l´autre, il faut un auteur. Et, il est apparait évident que nous le sommes, même à défaut de publier un écrit.
Car si vous lisez ce texte, c´est que l´heure de votre épilogue n´est pas encore venu et que pleins de belles choses restent à réaliser, dans la mesure du possible, à son échelle.
Pour paraphraser un ami, Julien, qui fêtait son anniversaire hier et à qui je dédicace cet écrit (d´autant que ce dernier s´est donné une tâche importante dans la réalisation d´une prochaine retranscription), il est important dans la vie de « fermer des boucles ». Ou le cas échéant d´apprendre à le faire. Cela afin de passer sereinement à autre cycle, transformer son énergie, changer de « focus », se renouveler, et tout simplement se réinventer, pour mieux donner du sens à sa vie.
L´épilogue dans le dépôt d´un document officiel pour une administration ou une juridiction est également un moment particulier, à immortaliser (du moins à conserver dans notre mémoire sélective). Car un épilogue peut être un point d´ancrage important dans un parcours de vie, il peut permettre de grandir, de regarder de nouveau devant soi, et nous obliger à nous (re)concentrer sur l´essentiel.
Dans la « vraie vie », c´est vrai, il n´est pas aisée de décider qu´un chapitre de notre existence est maintenant clos. Des reliquats du passé peuvent intervenir, qui nous rappelle une responsabilité d´antan que nous devons, par la force des choses, continuer d´assumer. Nous pouvons en revanche décider dès à présent de symboliser, « matérialiser » dans notre chair chaque nouvelle épilogue qui approche, de le visualiser et donc d´en tirer les effets bénéfiques.
La fin d´un bon libre qui offre par exemple la possibilité d´en lire et découvrir un autre.
La fin d´une aventure professionnelle qui permet de libérer ses possibilités.
La fin de travaux d´aménagements qui permettent de profiter des lieux.
A ce sujet, et vous ? Vous rappelez-vous la dernière fois que vous avez fourni un effort de travail immense, et que vous avez déposé, soulagé, en temps et en heure le rendu que vous deviez remettre ?
Qu´avez-vous ressenti, à ce moment précis ?
Que ressentez-vous habituellement lorsqu´une date fatidique approche ? Que son épilogue est proche ?
Eprouvez-vous de l´excitation ? Du stress ? Du ressentiment ? De la colère ?
Ou au contraire, une joie immense ? Une forme de soulagement ? La satisfaction du devoir accompli ?
Et si finalement l´Epilogue, plus que d´une finalité ou nécessité de conclure, était en fait synonyme d´un nouveau commencement ?
Un bon cheminement,
Mickaël Garin.
Une réflexion au sujet de « Epilogue »
Cher Michaël, je viens de te lire. J’ai été amusée par la phrase « mieux vaut avoir des remords que des regrets » car figure toi que j’ai pour habitude de me tordre le cerveau en prononçant cette phrase que je ne comprends pas. J’ai bientôt 70 ans et je ne la comprend toujours pas. En plus on l’entend souvent ce qui me plonge à chaque fois dans une profonde méditation.
En ce qui concerne l’écriture Sartre disait qu’il écrivait 8 fois chaque page. En lisant cela on comprend mieux le travail de l’écriture qui n’est pas qu’un don, mais également beaucoup de travail, Tu as du le remarquer car tu écris très bien. Je trouve qu’il est difficile de décider de la fin d’un livre car on peut travailler à l’infini sur un écrit en déplaçant les mots, en épurant les phrases, en rajoutant du matériel etc. Je crois qu’un écrit nous dépasse peut être parce que c’est un mélange de conscient et d’inconscient.