Iceberg

Ce mot m´est apparu pour la première fois en classe de primaire lorsque notre instituteur nous avait parlé du drame du Titanic. Je me rappelle notre maître de l´époque, craie à la main sur le tableau noir, nous dessiner la surface de l´eau, puis la partie immergée de l´Iceberg ainsi que le bateau (des plus sommaire comparé à l´ogre marin que représentait cette invention humaine d´époque). A un endroit précis, sur ce même schéma qui laissait entrevoir le choc, apparaissait ce fameux point d´impact ; Lequel venait dissoudre la structure métallique de cette belle mécanique. Les mots de ce professeur généraliste, employés pour décrire la scène advenue, étaient particulièrement limpides : “L´Iceberg était pourtant bien là, visibles de tous, néanmoins personne ne pouvait vraiment le voir car sa partie la plus importante, sa face cachée, se trouvait sous l´eau“. Autrement dit, l´immensité de ce bloc de glaçon géant détenait sous lui une partie encore plus volumineuse qui par le jeu des forces inverses permettait à la première partie nommée d´être visible ; Et à la seconde de rester cachée (sauf à se rendre physiquement sous l´eau pour l´aperçevoir).

James Cameron par la suite, avec sa version cinématographique, se chargea de nous fournir certains détails historiques comme l´inscouciance de certains passagers au moment de l´impact qui jouaient au foot avec un débris de glace, ou encore ces musiciens qui décidèrent de sonoriser cet environnement particulier jusqu´au tout dernier moment, en fait jusqu´à ce que l´eau les emportent…

Pour revenir à cette métaphore de la face cachée de l´Iceberg, il est curieux de constater que finalement cette partie occultée est sans doute la plus importante. En effet, c´est justement cette partie invisible qui permet l´émergence d´un résultat davantage visible, donc plus mesurable.

Prenons l´exemple d´un artiste peintre qui, fort de son talent, obtient enfin la reconnaissance qu´il mérite. Cette personne, à force de travail et d´une patience sans fin, de commencement puis recommencement, a su développer un certain doigté qui lui permet maintenant à ce stade de son parcours de vie (ou de sa propre évolution artistique), de réaliser en quelques jours, une oeuvre incroyable. Je prends volontairement cet exemple car un ami qui avait travaillé sur un salon pour promouvoir les oeuvres d´un artiste peintre reconnu, devait quelques fois, pour justifier le prix des tableaux, répondre à des personnes qui essayaient de savoir en combien de temps ce dernier avait été réalisé. La notion de prix pour faire l´acquisition d´un objet a son importance bien sur, et chacun veille à investir le plus justement possible par rapport à sa propre perception, néanmoins ce que j´ai trouvé remarquable fut la réponse apportée par l´artiste lui-même, lequel avait surpris l´échange, rétorquant une réponse pleine d´aplomb et qui était sans équivoque : “ Pour peindre ce tableau en particulier, cela m´a pris très exactement 30 ans et une semaine“. Traduite autrement la même formule reviendrait à dire: “Il m´a fallu environ une semaine pour la réalisation effective de ce tableau, néanmoins 30 ans d´expérience de peinture préalable pour arriver à un tel résultat…“.

Avons-nous réfléchi par ailleurs à combien de temps en moyenne il faut à un médecin pour devenir un bon praticien ? Pour tenter de répondre, il faut tout d´abord relever que la sélection est rude à l´entrée et que la charge d´apprentissage est élevée tout au long du parcours universitaire. La durée d´études est également largement supérieur à la moyenne de la plupart des autres branches. Pour schématiser, comptons dix ans d´études environ pour les étudiants de médecine contre cinq ans dans la plupart des autres cursus universitaires, en Ecole de Commerce ou d´Ingénieur (par exemple). En parallèle de ce temps universitaire, ce (futur) professionnel de la médecine prend le temps de se former sur le tas, avec des patients. Puis en fonction de son choix de vie, voir des prérogatives étatiques, ce médecin exerce par la suite soit dans un cabinet, soit à l´hôpital ou encore en clinique. Grosso modo, vous constaterez qu´il faut du temps, énormément d´heures de pratiques et qu´il faut là faire preuve d´un dévouement sans borne, qui s´inscrit dans un projet de vie à part entière. Si des milliers d´heures sont nécessaires pour devenir ce praticien efficient, cela peut sans doute être lié au fait que cet exercice d´une telle profession peut accessoirement sauver des vies autant que les compromettre.

A l´image du médecin, il n´y a pas vraiment de réponse bien sur pour savoir quant on devient “bon“ dans son domaine d´expertise. Néanmoins, quelque soit le métier ou la fonction que vous exercez, la qualité de vos investissements réalisés, l´harmonie trouvée au sein de votre famille, y compris pour votre don naturel à exploiter, une chose est sûre, cela ne s´est pas fait du jour au lendemain. Cela prend nécessairement du temps, où plutôt est-il préférable de dire que cela se construit avec le temps.

Pour un apprenti musicien déjà doué, cela peut parfois apparaitre ingrat de devoir faire ses gammes, néanmoins cette étape est nécessaire si par la suite il veut aller plus haut, plus loin et le cas échéant composer ses propres partitions un jour.

De la même manière, il n´est pas toujours aisé de partir à l´étranger lorsque l´on est jeune étudiant, même avec la bonne intention de perfectionner l´apprentissage d´une langue. Néanmoins, quoi de mieux que de vivre en immersion pour améliorer sa connaissance culturelle d´un pays, penser et interagir avec de nouveaux mots ? Revenir en parlant couramment l´anglais, l´espagnol ou l´italien, l´allemand ou le russe, l´atteinte de ce noble objectif est souvent la conséquence d´un travail de fond. Celui du quotidien, des petites habitudes, de chaque mot à écrire, articuler ou mémoriser pour aller de l´avant. Parler couramment une langue non native est la résultante d´un effort, celui de l´invisible (en fait principalement aux yeux des autres car la personne qui a fournit chacun de ces efforts elle sait combien cela lui en a couter pour arriver à obtenir un tel résultat.

Dans un autre registre, un éducateur dans l´âme, où qu´il aille reste vigilant à faire passer des messages pour chaque enfant qu´il croise. Cela étant combien d´altercations et de moments de tensions avec d´autres jeunes ce même animateur ou éducateur aura t – il eu ? Pour, au final, après une expérience accumulée trouver les mots justes, la bonne formule pour faire passer un message positif à un jeune.

Finalement, quoique l´on fasse dans la vie, cela demande de l´apprentissage, de faire des essais erreurs, de se positionner, de travailler sur soi. Le cas échéant savoir se créer des opportunités, pour mieux les saisir. C´est ce travail de l´ombre qui compte, celui que l´on ne voit pas, ou très peu.

Nous avons tous tendance à regarder le résultat, néanmoins ce dernier est souvent la conséquence d´un effort entrepris auparavant, d´avoir su tirer les leçons d´expériences passées ou tout simplemement pris soin d´améliorer ses relations sociales. Pour réussir, obtenir un résultat significatif, c´est bien ce travail de l´invisible qui est nécessaire.

Pour conclure, un ami qui finissait sa thèse à l´époque, m´avait convaincu en me disant que lire chaque soir, même un simple paragraphe avant d´aller se coucher était une habitude des plus nécessaire à prendre. Principalement, car cela stimulait le cerveau, créait des connexions et accessoirement car cela permettait de créer de nouvelles idées et à terme de changer son paradigme.

D´ailleurs la partie visible et invisible de l´Iceberg est tout autant comparable à notre conscient et inconscient. Ce dernier a une part prépondérante dans notre manière de vivre, et heureusement il agit favorablement pour nous dans bien des cas. En effet, si à chaque fois que nous prenions le volant, nous devions nous reconcentrer sur les nombreuses tâches qu´incombent la conduite d´un véhicule, nous serions loin d´arriver en temps voulu à destination… Idem, si nous devions à chaque instant nous rappeler de respirer nous aurions peu de temps disponible pour d´autres activités.

In fine, si l´on considère l´Iceberg dans son ensemble, les deux faces situées au dessus et au dessous de l´eau sont tout autant nécessaires à l´une comme à l´autre. A ce jour, nous sommes encore à l´aube d´une nouvelle année. Le mois de janvier étant en effet idéal pour définir ce que nous aimerions voir apparaitre dans nos vies (re)surgir à la surface d´ici les douze prochains mois.

Pour ce faire, avez-vous bien conscience de la partie cachée de votre Iceberg ? Qu´avez-vous besoin d´entreprendre et ressources à utiliser pour mener à bien votre principal projet de l´année ? Êtes-vous prêt à fournir les efforts nécessaire qui vont permettre la bonne réalisation de ce projet ?

Petit aparté : Et si la fameuse loi de Pareto (communément appelé loi des 20/80) était une autre forme de transcription de ce même effet Iceberg ? 

Dans tous les cas, et là est bien l´objet de cet article, avez-vous envie de capitaliser sur votre expérience acquise pour faire de cette année 2022 la plus belle des années ? Si oui, n´hésitez pas à indiquer au début de votre nouvel agenda vos envies personnelles et professionnelles à accomplir.

Un bon cheminement,

Mickaël Garin

2 réflexions au sujet de « Iceberg »

  1. J’ai lu ton texte, ça m’a rappelé une histoire passée il y a 50 ans qui m’avait marquée puisque j’y pense souvent. Brigitte Bardot la pus belle femme du monde avait prêté son corp pour faire la promotion d’un pantalon. Comme pour cette prestation elle avait reçu un très gros chèque, on lui en avait fait le reproche, jugent certainement qu’enfiler un pantalon ne méritait pas cette somme. Ce à quoi elle avait répondu que ça représentait 40 ans de travail.

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