L´arroseur arrosé

Le film culte des frères Lumière, un des tous premiers de l´histoire du Cinéma, via son titre évocateur, donne une belle morale qui pourrait s´appliquer à bons nombres de situations rencontrées.

Dans certains pays, ou plutôt, conformément à certaines croyances, le Karma est ainsi évoqué pour transmettre l´idée que ce que l´on fait, d´une façon ou d´une autre, nous reviendra, tel un boomerang, en pleine figure. Autant donc choisir ses paroles et ses actes et souhaiter le meilleur à ses interlocuteurs et éviter, dans la mesure du possible, de « faire ou de souhaiter du mal » à autrui. Cette philosophie de vie est belle, en théorie. Dans les faits, dans un monde où le niveau de conscience et de bienveillance n´est pas le même entre les individus, que faire lorsque nous rencontrons des personnes cataloguées aujourd´hui comme « toxiques » qui se trouvent sur notre chemin, font même partie intégrante de notre parcours de vie, et décident d´une manière ou d´une autre de (vous/nous) nuire ?

« Courage, fuyons » répondront certains. C´est une option qui peut être particulièrement utile lorsqu´après moultes tentatives, d´apaisement ou de réconciliation, votre interlocuteur/trice refuse tout dialogue et volonté de changements. Ou au choix, que l´on est pourchassé au milieu de la savane par un grand fauve. Toute métaphore avec ce qui peut ressembler à une jungle, notamment dans le monde des affaires (même si ce dernier tend à s´épurer), n´est absolument pas fortuite. L´inconvénient de ce type de comportement, outre le fait qu´il puisse être assimilé par certaines personnes à une forme de « fuite en avant », est que si tout le monde en faisait de même alors il est probable que ce type d´attitudes néfastes continuent de se généraliser (notamment chez celui ou celle qui en a pris l´habitude). En effet, cela peut donner à ce type de personnage, l´illusion que la plupart des personnes ne diront rien, ne feront rien ; Et qu´en définitive il y a conséquemment plus à gagner qu´à perdre pour lui/elle en continuant de se comporter de la sorte. Au détriment donc des intérêts d´autrui, ne privilégiant que le sien en toutes circonstances. Et cela même en dépit du bon sens.

Le fameux rapport bénéfice/risque serait ainsi à priori plus grand pour celui qui décide de s´affranchir de certaines règles de bonnes conduites en vigueur dans un état de droit, plutôt que de « s´abaisser » à respecter la loi, les juridictions. Finalement ce pari risqué fonctionne assez bien si la personne en face, « supposé faible » par son persécuteur en puissance (qui tentera c´est sa spécialité de se faire passer pour une victime), exclue la possibilité, pour une raison ou une autre, de faire valoir ses droits devant la juridiction compétente. Ce renoncement, en définitive, dessert la cause d´un monde meilleur où chaque individu serait respecté dans sa fonction, dans son être, ou dans son mode de fonctionnement.

« L´indifférence » – postérieur à une réflexion profonde – dont la conclusion serait qu´il n´y a rien de mieux à faire, pourrait être salvatrice. A condition toutefois, que cette forme d´éloignement émotionnel, soit réel et sincère. Il ne s´agit pas, cela va de soi, de la prétendre et de penser que notre inconscient s´en accommodera. Si cette indifférence est actée dans notre chair et dans notre esprit, autant que dans notre cœur, alors les effets de « s´en foutre » et de s´amuser, plus que de s´énerver de l´ineptie d´une situation devenue des plus rocambolesques sera très bénéfique.

« Faire face », du mieux possible à l´adversité. Lorsqu´une personne déclenche les hostilités à votre encontre, tente de vous intimider, essaye de vous déstabiliser ou trouver toutes les formes de pressions susceptible de vous faire tanguer, « craquer », comme c´est le cas par exemple dans une relation professionnelle qui se termine mal, alors c´est là qu´il faut tenir bon, faire le dos rond et encaisser les coups sans broncher (du moins pour un temps). Pour celui ou celle qui est aveuglé(e) par ses propres ambitions, il est tentant de profiter d´un moment où vous êtes « moins bien » car vous venez par exemple de vous séparer, avez perdu un ou plusieurs êtres chers, et n´avez pas forcément la tête à vous occuper de vos affaires (lesquelles vous semblent bien dérisoires par rapport à ce qu´il a d´essentiel dans la vie). Le mieux dans ce cas là, pour la personne dont le timming n´est pas approprié, est alors de laisser passer la tempête. Prendre le temps de se requinquer, et le cas échéant décider de se faire accompagner pour véritablement « faire face » dans les meilleures conditions et ainsi « reprendre le lead » de sa vie. Se reprendre dans un premier temps, puis faire front. A noter que « faire face » est peut-être la version « soft », autrement dit plus « apaisée » du paragraphe suivant.

« Œil pour œil, dent pour dent », est en effet une réplique biblique qui peut être adaptée à bon nombres de situations où son interlocuteur ne vous laisse pas d´autres choix que de celui de se défendre, contre-attaquer. La réponse doit être appropriée, réfléchie et à la mesure des accusations dont vous pouvez faire l´objet. Il faut veiller, dans sa réplique, à ne pas s´emporter, être animé d´un esprit aveugle de « vengeance » (hélas, souvent associée à cette fameuse citation) qui serait tout autant destructeur pour celui qui en subit les foudres que pour celui ou celle qui les aurait provoqués. Comme alternative à une réaction chargée d´émotions, les japonais parlent « d´effet miroir » pour montrer de manière métaphorique à celui qui tente de vous déstabiliser, en retour, son véritable visage. Cela peut être violent pour celui qui se voit tel qu´il refusait jusqu´à présent de se regarder, néanmoins il faut, pour se préserver, tenter de ne pas prendre un problème qui n´est pas le sien. Et donc tendre le miroir à votre accusateur pour l´obliger à regarder une situation qu´il a lui-même crée. Sa défiance vous a fait naitre la vôtre. Son manque de confiance finit par vous ouvrir les yeux sur le fait qu´il ne méritait nullement que vous lui accordiez la vôtre. Sa manière sournoise de procéder, vous aura éloigné physiquement et émotionnellement de toute forme d´empathie à son encontre. La page étant depuis tournée et le chapitre du livre ainsi refermé.

En résumé, que ce soit au moment d´entamer les procédures d´un divorce, d´une séparation dans les affaires, d´une fin de relation contractuelle, il y a parfois des moments où il faut faire le choix de la passivité ou au contraire de l´offensive. L´entre-deux reste possible, si vous êtes à l´aise avec une non-décision (qui par définition en est une), à condition de n´éprouver aucune forme de regrets. Dans tous les cas, prenez le temps de la réflexion si vous en avez besoin, conseils auprès de professionnels, cependant in fine, décidez, décidez-vous ! Ensuite, assumez, commencez et soyez prêt à aller au bout, afin de mener votre combat, le « bon combat », celui de la défense de vos intérêts et ce qui revient au même celui de vos proches.

Si vous ne le faites pas pour vous, pour votre simple cause, alors faites-le pour une raison plus grande que la vôtre (la défense par exemple d´autres personnes qui auraient subi le même sort, la protection de votre famille ou le cas échéant l´avenir de vos enfants, etc.).

Tout « challenge » quel qu’il soit fait grandir, nous pousse à aller chercher en nous les raisons d´agir, d´assumer pleinement une demande des plus légitime. Demander le respect de son interlocuteur, que ce dernier soit condamné juridiquement (civilement ou pénalement) prend tout son sens pour celui qui est animé par la nécessité d´avancer sereinement sur son chemin et faire valoir ses droits, tout simplement.

« La justice de la vie » est une formule qui m´est apparue ce jour au moment d´écrire ce texte, en écoutant un audio. J´espère que ce partage sera utile à toute personne qui aura été victime d´une injustice, et pour qui il est encore temps de réagir, si tel en est sa volonté.

Pour revenir à l´allégorie de l´oeuvre des frères Lumière, dans votre vie personnelle ou professionnelle, vous êtes-il déjà arrivé de recevoir quelques gouttes de la part d´un apprenti jardinier arroseur ? Lequel avait pourtant un tuyau d´arrosage défectueux qu´il utilisait pour remplir un vieil arrosoir à moitié troué ? (Par exemple au cours d´un mois d´août – si la précision temporelle fais sens à votre histoire…)

Quel effet ce geste (le fait de se sentir « arrosé ») a-t-il eu sur vous ? Cela vous a-t-il blessé ? Fait réagir ? Heurté ? Ou au contraire… Fait sourire ? Amusé ? Ouvert les yeux ?

Et si, finalement, vous déteniez la clé vous permettant d´ouvrir le système d´arrosage automatique permettant de tremper des pieds à la tête votre jardinier de fortune (encore bien présent sur les lieux) ?

Que décideriez-vous de faire ?

Jeter la clé ? La mettre sous la porte ? Ou plutôt la conserver et attendre le cas échéant de l´utiliser à un moment plus « opportun » ?

A moins que votre décision ne soit déjà prise, et qu´il soit temps d´ouvrir pleinement les jets d´eaux ? Autrement dit, choisir d´arroser votre arroseur et ainsi lui fait ressentir ce qu´il avait tenté de vous infliger…

En période estivale, l´eau a également comme vertue de rafraîchir… Charge à chacun de l´utiliser à bonne convenance…

Un bon cheminement…

Mickaël Garin

Une réflexion au sujet de « L´arroseur arrosé »

  1. Cher Michaël comme nous en avions parlé, Il est vrai que je ne règle pas mes comptes, pensant que j’ai mieux à faire pour passer à autre chose. A l’heure où je t’écris je n’ai toujours pas de regret. Je pense à tout le temps que cela m’a laissé pour entreprendre autre chose . Je pense également que dans notre parcours de vie nous nous transformons souvent au fil des années. Il n’est pas certain que de dix ans en dix ans nous réagissions de la même manière. C’est aussi beaucoup pour cette raison. Je laisse à la vie le soin de régler tout ça, pendant que libre je consacre mon énergie à autre chose. Pour moi faire la justice serait comme se substituer à dieu. Notre réponse sera t elle proportionnée à la situation ? Mais tout cela n’est que mon point de vue qui correspond également à mon énergie et à mon tempérament.
    Cher Michaël que de questions tu agites là.
    Je t’embrasse
    Danielle

Laisser un commentaire