Prescription

Combien de temps un évènement du passé doit-il continuer à nous faire souffrir ? Combien de temps doit on attendre avant de recontacter quelqu’un avec qui nous avons eu une fâcherie ? Doit-on continuer de tenir rigueur encore longtemps pour une parole maladroite ? Un geste ou une attitude déplacée ?

Nous ne sommes pas tous égaux devant la douleur ou même le bonheur, et pourtant l’une ou l’autre de ces états d’être ne semble pas durer éternellement. Pour passer outre, à autre chose, encore faut-il avoir envie d’avancer, de regarder devant. Affirmer son envie de prescrire une situation qui appartient par définition au passé. Afficher son ambition de renaitre de ses cendres pour tel un phénix s’envoler vers les cieux. Décider de prescrire revient à décider de refermer, de clore un chapitre du livre de notre vie.

Au niveau judiciaire, suivant la définition Larousse : « La prescription est un écoulement d’un délai à l’expiration duquel une action judiciaire ne peut plus être exercée, ou bien une situation de droit ou de fait est acquise. Nota : La prescription acquisitive fait acquérir un droit réel par la possession prolongée ; la prescription extinctive fait perdre un droit à son titulaire s’il ne l’a pas exercé dans les délais. ». Au niveau médical « La prescription thérapeutique, éventuellement consignée sur ordonnance, est faite par le médecin ».

L’avantage dans notre vie de tous les jours, c’est qu’à chaque moment, lorsque nous le décidons, nous avons la possibilité de nous autoprescrire une ordonnance dans le but de nous autoriser à aller mieux.

Dans le monde de l’entreprise lorsque l’expression employée par un supérieur hiérarchique est de dire qu’il y a « prescription » cela revient à dire qu’on va laisser la poussière sous le tapis ou ce qui revient au même qu’il n’est pas nécessaire de remuer le « caca ». Si entendre ce mot est parfois frustrant pour celui qui veut faire avancer les choses, cela peut parfois permettre au sein d’une organisation d’apaiser des tensions.

Prescrire à son collaborateur un peu de repos pour revenir travailler dans les meilleures dispositions serait une recommandation des plus favorable. Prescrire de s’abstenir de critiquer une autre personne un plus indéniable pour rester focaliser sur l’essentiel de nos/vos objectifs de vie.

Faire preuve de bienveillance envers les autres et envers soi-même s’apprend. Nul n’est parfait. Chacun agit et réagit en fonction de son état émotionnel, de conscience ou de fatigue du moment. Se donner la possibilité de faire prescription équivaut à faire table rase du passé. Soit, décider de ne plus tenir compte de ce qui a été écrit, dit ou fait auparavant afin de repartir sur de nouvelles bases.

Dans le processus du coaching il est important d’identifier les évènements du passé qui peuvent avoir une incidence sur notre vie actuelle. En d’autre termes, identifier ce qui peut « polluer » encore notre énergie aujourd’hui. Sinon cela revient à courir un marathon avec un caillou dans la chaussure. Insignifiant au début, ce dernier prend toute son importance au fil de l’avancée et peut même compromettre la réalisation jusqu’au bout de cette dernière. Si par chance le coureur arrive au terme de la course, malgré cet incident de départ, il en ressortira nécessairement plus affaibli car blessé dans sa chair. Pour en revenir au « gaspillage énergétique » que chacun de nous peut connaitre il faut prendre le temps de « nettoyer » son environnement, en amont prendre une décision et passer conséquemment à l’action. Décider de vivre avec une partie de son passé peu ou mal « digéré » peut entrainer de la rancœur. En conséquence, on peut décider consciemment qu’il est temps de faire prescription pour justement s’alléger.

Petite anecdote. Je devais avoir 7 ou 8 ans quand nous attendions avec d’autres camarades du centre aéré devant la piscine estivale. C’était le genre de moment où on avait attendu tellement longtemps pour pouvoir rentrer en petits groupes à l’intérieur que nous commencions à nous impatienter. Et là, dans un moment d’inadvertance j’avais pris un petit caillou pour le lancer au-dessus de la rivière quand ce dernier alla se loger au niveau de la tempe d’un petit garçon, Pierre. Il cria et pleura instantanément, il répéta le pauvre en boucle que c’était « la fille » qui lui avait fait ça. Malgré mon jeune âge j’assumais instantanément et lui dit que non c’était bien moi. Sur le moment l’urgence pris le dessus, il fallait l’emmener se faire recoudre et refermer sa plaie. Cet incident me marqua pendant quelques temps. Je venais d’expérimenter le fait que je n’aimais vraiment pas faire mal à l’autre. Quitte à choisir j’aurais préféré que le caillou lancé atterrisse sur mon crâne. Néanmoins, de cette expérience j’avais appris que le fait de décider de passer à autre chose, de s’excuser pour pouvoir également se pardonner à soi-même d’un geste malheureux, était un processus nécessaire. J’avais décidé sans le savoir de faire prescription sur mon propre geste de lanceur de pierre.

Et vous à votre niveau, avez-vous eu aussi des moments comme cela « malheureux » que vous auriez aimé effacer de votre mémoire ? Souhaiteriez-vous que ces derniers ne soient jamais arrivés ?

On ne peut pas effacer le passé, néanmoins on peut en tirer les leçons et faire en sorte que ces dernières nous permettent d’avancer, in fine de mieux vivre.

Quand on y réfléchit, et c’était bien là tout l’objet de cet article du jour, le concept de « prescription » peut vraiment s’avérer utile dans la plupart des situations.

Prenons par exemple d’une brouille avec un proche, quel est l’intérêt de la maintenir dans le temps ? Autant entamer sans attente le processus de prescription. Si finalement on ne doit plus se parler ou à l’inverse se réconcilier, pourquoi attendre ? Pourquoi souffrir de cet évènement ?

Prenons l’autre exemple d’un conflit au travail ? Quel est la nécessité de maintenir ce dernier dans le temps alors qu’avec une simple communication peut permettre d’arranger les choses ? Autant faire que cette affaire soit prescrite et donc repartir sur de nouvelles bases.

Pour conclure, dans votre vie actuelle, sur quel évènement (ancien ou nouveau) avez-vous envie d’appliquer immédiatement ce délai de prescription ? Et en conséquence repartir du bon pied.

Un bon cheminement…

Mickaël Garin.

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